LE CHEMINEMENT VERS LE CŒUR DE PARC
N’A PAS ETE « LE CHEMIN DE L’EXCELLENCE* »
La mise en place d’un Parc National est un révélateur de l’état et du fonctionnement de notre société comme le sont la plupart des projets importants de protection de la Nature quand ils structurent un territoire. La Ciotat n’a pas fait exception en la matière :
UN CŒUR AMPUTE ET UNE AIRE D’ADHESION ETRIQUEE
Nous avons exprimé nos regrets quant au manque d’ambition lié à l’« aire d’adhésion » de La Ciotat (« zone tampon » autour du cœur). La dynamique autour de cette aire aurait même pu se mettre en place en articulation avec les entreprises maritimes du site des chantiers navals et de la zone Athélia, autour des « pôles de compétitivité » définis par le gouvernement en 2008 puisque l’un de ces 16 pôles, celui dénommé « mer » se trouve à Toulon et l’un de ses axes est le « développement durable ». Nous en sommes hélas très loin car l’équipe municipale n’a rien décidé d’ambitieux autour de son « aire d’adhésion » au parc. Avec nos réserves sur le périmètre du cœur ciotaden, c’est là notre second grand regret. (lire le communiqué du 19 avril 2012 pour des approfondissements sur l’aire d’adhésion).
UNE COLLABORATION VOLONTAIREMENT RATEE AVEC LE GIP
Si l’équipe municipale ciotadenne n’a pas fait ce choix, et c’est là notre troisième regret, c’est parce qu’ elle est entrée dans ce projet de Parc qu’à reculons, heureusement pressée par le pression associative et citoyenne que nous avons dû créer pour cela à grand renfort de temps et d’énergie. Avec cette attitude, La Ciotat s’est privée des services du GIP Calanques qui aurait par exemple pu mettre en place ses patrouilles estivales vertes et bleues jusqu’à La Ciotat à chaque belle saison, ce qui aurait permis de mieux faire comprendre le projet aux usagers ciotadens, tout en commençant depuis plusieurs années à mieux protéger le site, en particulier contre l’incendie !
Au contraire, Noël Collura, adjoint à l’environnement, déclarait en décembre 2005 (lors d’une visite à Ste Frétouze) : « Dès que le GIP passera le relais, nous entrerons dans le Parc national » (ce qui était totalement impossible car cela se serait fait bien trop tard). D’ailleurs, dès 2006, sortant enfin de sa réserve, Lionel Royer-Perreaut, directeur de cabinet de Guy Teissier, le président du GIP Calanques, avertissait, confortant en cela nos inquiétudes : « Il n’y a jamais eu de véritable débat de fond sur la volonté ou non de la commune de La Ciotat d’adhérer au parc, ni d’étude menée dans ce sens » (La Provence du 18-05-06).
Et pour cause : La Ciotat n’avait toujours pas rejoint le GIP justement chargé de mener ces études ! C’était là une forme de mise en garde, précédée de ces termes tout aussi inquiétants pour l’intégration de La Ciotat : « (…) la mise en place du Parc National des Calanques est le fruit de dix années de travail et de concertation des usagers et habitants menées par le GIP » (Ibid) Travail mené à Cassis et Marseille… mais jamais encore à La Ciotat avec toutes les conséquences imaginables : zéro « années de travail et de concertation » chez nous… S’il n’y avait pas eu les études marines Natura 2000 menées par le GIP jusqu’à La Ciotat (qui se trouve dans le même périmètre Natura 2000 que Marseille), il est fort possible que jamais nous n’aurions pu rattraper à temps le retard accumulé par cette politique de la chaise vide.
Par son attitude de refus, la mairie de La Ciotat a donc empêché la concertation de se tenir à La Ciotat pendant des années, laissant même une forme de contestation au projet monter crescendo. Ainsi, l’année suivante, Noël Collura se vantait encore en plein conseil municipal pour justifier la non-adhésion de la commune au GIP : « le GIP, on a bien joué pour le moment (16 avril 2007) ». Ceci alors même que le thème central de la discussion en conseil municipal tournait justement à la plainte du supposé « peu d’information » que le GIP donnait aux élus ciotadens sur le projet. Mais cela se produisait justement parce que la mairie de La Ciotat ne s’était pas montrée concernée par le projet et ne prenait toujours pas le train du GIP en marche comme notre collectif s’évertuait à le dire. Bref, une situation où l’on tourne en rond dans l’immobilisme a été maintenue aussi longtemps que possible à La Ciotat.
De même, toujours sur la manière bien étrange de se saisir du projet, en ce qui concerne l’exclusion du cœur pour le Mugel, alors que c’est la zone la plus fréquentée du site en été, alors que les départs d’incendies s’y succèdent et ont déjà abîmé un paysage unique au monde, alors que c’est là même que les moyens du futur parc seraient les plus utiles, le premier adjoint au maire de La Ciotat, Guy Patzlaff déclarait le 9 mars 2009 devant un parterre de chasseurs réunis en assemblée générale et à l’égard du futur Parc : « Croyez-vous par exemple que nous allons leur faire cadeau du parc (municipal) du Mugel (….) ? » Les chasseurs avaient de la chance : un élu ciotaden répondait à leur invitation. Mais pourquoi un tel ton de défiance vis à vis du projet ?
UN DEFICIT D’INFORMATION ENTRETENU
En outre, quatrième regret, à notre grande surprise, jamais l’équipe municipale ne chercha à simplement informer les ciotadens sur la réalité du projet. En 8 ans, le bulletin municipal ne s’est que très rarement ouvert pour informer sur les richesses du site dans la perspective du parc, sur le fonctionnement d’un parc national, jamais il n’y a été tenté de dégonfler la désinformation qui battait son plein et que certains se plaisaient à littéralement instrumentaliser.
Pire, l’adjoint à l’environnement, voire le maire, lui même, ont bien souvent présenté le parc comme un épouvantail, agitant des chiffons rouges au lieu de faire œuvre d’un minimum de pédagogie :
«Qu’est-ce que ça rapporte aux ciotadens, combien ça risque de leur coûter ? » (Patrick Boré, maire, conseil municipal du 16 avril 2007), « d’abord, y’en a une dizaine à La Ciotat, et ce sont des gens qui font vivre leur famille, il y a une dizaine de familles qui vivent avec les petits métiers de la pêche, donc il faudra pas les oublier ! » (P.Boré, Ibid)
« les chasseurs et les promeneurs seront tenus de montrer ce qu’ils ont dans leur sac quand ils se trouveront en cœur de parc, ça c’est un truc inadmissible ! (Noël Collura, conseil municipal du 16 avril 2007) » ; « Qui va payer pour le cœur de parc et pour les emplois qui vont être créés, qui déjà y’en a certains qui s’en disputent la paternité ! » (N.Collura, Ibid)
« Après, qui va nous dire si demain, au décès des propriétaires, l’Etat ne va pas dire « je rachète au prix des domaines » ? Et les héritiers et les autres ? Des maisons familiales ! (…) » (N.Collura, Ibid)
Il est difficile d’imaginer que des élus municipaux n’aient pas trouvé les moyens de s’informer un minimum sur tous ces sujets avant d’en faire des repoussoirs du Parc en plein conseil municipal : aucune de ces craintes parfois très graves contre le parc n’est fondée et ne l’a jamais été comme nous l’avons toujours souligné ! Pour les pêcheurs, souverains en ce qui concerne les réserves de pêche, une mise en réserve est une « usine à poisson » et pour la chasse, voilà un parc où elle a été annoncée comme autorisée depuis des années.
Ce genre de propos alarmistes issus de la bouche des élus ciotadens ont régulièrement été repris ou cités par la presse locale au fil des mois et des années, contribuant à diffuser une hostilité latente au projet. Hostilité en haut lieu de surcroit puisque provenant d’élus de la majorité. Alors, pourquoi ?
Etait-ce une manière de gagner du temps pour masquer le retard de réflexion indéniable de ces élus vis à vis d’un projet d’une telle importance pour La Ciotat et son territoire ? Une manière de créer sciemment de l’opposition au projet pour entrer facilement dans le rôle électoralement rémunérateur du protecteur efficace des populations autochtones contre les horreurs jacobines parisiennes à venir et instrumentalisées à dessein comme telles ? Etait-ce simplement de l’incompétence ? De la mauvaise foi ? La peur de perdre de la souveraineté sur un territoire pourtant déjà gelé par le classement (loi 1930) ? Un peu tout à la fois ? Un simple dialogue avec notre collectif associatif aurait pourtant pu dissiper bien des craintes.
Le pire c’est ce cercle vicieux : jusqu’à ce que la mairie de La Ciotat rejoigne le GIP fin 2007, toutes nos demandes pour obtenir à La Ciotat une présence du GIP ou un intervenant afin de répondre aux questions pressantes de certains habitants (surtout des opposants virulents) voire des élus restaient vaines : le président du GIP, Guy Teissier, UMP, ne pouvait pas désavouer son collègue politique Patrick Boré maire UMP de La Ciotat par une présence du GIP que la mairie n’avait pas encore choisi de rejoindre ! Avec nos modestes moyens associatifs, nous avons donc dû maintes fois nous substituer au GIP, avec des compétences moindres et surtout, les moyens dérisoires d’une association sans les ressources adéquates pour ce genre de mission ! Le tout pendant que les élus de la majorité se plaignaient d’un GIP qui n’informait pas suffisamment à La Ciotat. Le serpent se mordait la queue et les proportions souvent ubuesques da la situation avaient de quoi décourager !
Encore en janvier dernier dans La Provence quand les commissaires enquêteurs recommandaient (fait rare !) de réintégrer le quartier de Ste-Croix en cœur de parc, Noël Collura tentait de souffler une dernière fois le chaud et le froid déclarant que si Ste-Croix était intégré au cœur, « nous reprendrons nos billes et le Parc se fera sans La Ciotat. » Rien de moins à un moment crucial pour le projet que de terminer sur le mode du chantage. Las ! Nous pourrions aussi revenir sur l’attitude très peu constructive, voire de défiance de M Collura lorsqu’il siège aux réunions du GIP comme représentant de la mairie : pourquoi choisir ce mode d’échange pour collaborer avec un projet de toute façon incontournable à La Ciotat ? Devant tant de mauvaise volonté, le GIP aurait pu à plusieurs reprises se décourager et décider de poursuivre le projet sans La Ciotat pour gagner du temps !
LE REFUS PERMANENT DE CONSIDERER « LA CIOTAT CŒUR DE PARC »
Notre cinquième regret concerne hélas à nouveau la mairie de La Ciotat et les relations qu’elle a choisi d’entretenir avec notre collectif : dès la première réunion de notre groupe pour créer « La Ciotat Cœur de parc », en mai 2005 nous avons écrit à la mairie de La Ciotat pour lui demander sa position sur le projet. Jamais nous n’avons reçu de réponse officielle au nom de nos associations respectives. Un mois plus tard, nous avons invité le maire ou l’un de ses représentants lors de notre réunion constitutive officielle de juin 2005, personne ne vint et jamais nous n’avons reçu de réponse officielle adressée à notre collectif. Au fil des mois, nous avons officialisé notre demande d’entrevue à plusieurs reprises mais n’avons jamais obtenu non plus la moindre réponse officielle.
Ceci n’a pas empêché Noël Collura, toujours lors du fameux conseil municipal du 16 avril 2007, de déclarer à notre grand étonnement : « Le Cœur de Parc (notre collectif), je signale qu’ils n’ont jamais demandé un rendez-vous avec moi-même, Noël Collura, sinon je les aurais reçus. » ! C’est au mieux totalement inexact, au pire extrêmement provocateur. Nous conservons toutes les preuves de nos courriers. Faut-il sinon oser imaginer du sabotage de courrier au sein des services municipaux ou une désorganisation totale de la distribution du courrier en mairie ? C’est impossible car nous concernant, cela a été trop systématique.
En outre, lors de nos grandes manifestations publiques (en 2007 et en 2009), nous avons toujours invité le maire ou l’un de ses représentants, jamais aucuns n’ont daigné se déplacer. Nous représentons quand même 41 associations ciotadennes, c’est probablement le plus grand collectif associatif ciotaden jamais créé !
Par honnêteté, devons remarquer que seuls les conseillers municipaux de l’opposition ont joué leur rôle positivement en ce qui concerne le projet de Parc National (présence à nos invitations, questions pertinentes posées en conseil municipal, demandes de respect du calendrier, prises de paroles parfaitement argumentées concernant le projet…). Qu’ils soient ici remerciés pour la dignité de leurs propos et leur intégrité vis à vis du projet, en particulier M. Gendhouf, Mme Reynaud, M. Repiquet et M.Chabaud . Eux ont d’emblée saisi la portée du Parc National pour La Ciotat, à l’image de M. Guy Teissier pour l’ensemble du projet dès lors qu’il l’a investi dès l’année 2000.
Ce refus du dialogue de la majorité municipale ciotadenne nous laisse donc un goût amer et reste un mystère réel pour nous.
Que déduire de ce « deux poids deux mesures » ? Par exemple, notre adjoint à l’environnement en personne, Noël Collura était bien présent lors de la rencontre publique organisée par… les anti-parc.
A chacun de se faire son idée mais les faits sont là car ils nous ont coûtés et empêchés de fonctionner sereinement en partenariat constructif avec la mairie comme cela aurait dû être le cas depuis 2005. Toujours rester ouverts au dialogue, tendre sans cesse la main à la mairie, c’était notre souhait constant et nous nous y sommes toujours tenus, les copies des courriers de l’époque en témoignent là aussi. En face, la fermeture a été totale.
UN COMITE ECOLOGIQUE … CONTRE LA PROTECTION DE LA NATURE !
Enfin, cerise sur le gâteau, grâce à la mise en place du Parc National, nous avons pu voir comment l’ancien « Comité Ecologique » de La Ciotat a été « repris en main » à la disparition et au décès de ses fondateurs qui avaient pourtant imaginé et créé l’Atelier Bleu et souhaitaient déjà dans les années 70 et 80 une protection forte de type « parc » ou « réserve » pour le « Cap de l’Aigle ». Ainsi, faisant table rase du passé de façon outrancière, la « nouvelle » équipe autour de Béatrice de Crozet s’est-elle acharnée autour d’un combat très médiatisé : dénoncer et s’opposer au projet pourtant bien écologique de préserver pour toujours à La Ciotat des milliers d’hectares terrestres et marins grâce à un Parc National !
C’est notre sixième et dernier regret : durant toutes ces années, cet étonnant Comité « écologique » aura passé son temps et son énergie à fédérer toute l’opposition ciotadenne au Parc, y compris la plus virulente, le plus souvent en agitant la peur comme seule méthode.
Nous aurions préféré un minimum de décence et de transparence par la constitution d’une authentique association anti-parc plutôt que ce choix d’utiliser l’entité « Comité Ecologique ». Il fallait oser. Ayant choisi un chasseur ostentatoirement présenté comme tel pour trésorier, ce Comité se sera rangé aux côtés des défenseurs de la pratique du jet-ski à La Ciotat pour s’opposer au parc lors d’une réunion « mer » organisée à notre initiative justement lorsque nous étions obligés de nous substituer au GIP parce que la mairie de La Ciotat n’en voulait pas.
Cette association est allée jusqu’à inviter lors d’une grande soirée publique les élus pyrénéens Jean Lassalle et M. Casadebeig (maire de Laruns), venus expliquer sans rire à La Ciotat devant une bonne centaine de personnes combien un Parc National pouvait martyriser les populations locales ! L’élu ciotaden à l’environnement était alors aux premières loges parmi le public invité et se garda bien de toute critique devant un discours plus qu’outrancier contre les Parcs Nationaux. Le député Lassale est l’un des élus les plus hostiles à la protection de la Nature que compte notre pays. Il a même à son actif la disparition de la souche pyrénéenne de l’ours brun à cause de son immobilisme sur le sujet depuis 1994 alors que l’Etat avait commis l’erreur de lui laisser les mains libres et les poches pleines pour soi-disant sauver l’ours des Pyrénées. On sait ce qu’il en fut. Le voilà associé désormais à la croisade anti-parc du Comité Ecologique ciotaden dans cette incroyable capacité à tourner le dos aux richesses naturelles exceptionnelles d’un territoire.
La présidente de ce Comité sera même allée jusqu’à déclarer en pleine réunion publique, en 2009, que les sites naturels de notre région subissant « trop de protections »(!), le futur Parc des Calanques en serait une de trop ! A propos de la région la plus bétonnée du pays, c’est une vision des choses pour le moins originale, surtout de la part d’une personne se réclamant de l’écologie.
Que de temps et d’énergie mobilisés pour cette croisade inédite, non pas pour lutter par exemple contre les excès de l’urbanisation à La Ciotat, non plus contre l'immersion de 7 statues publicitaires hideuses et en plastique dans un paysage sous-marin de rêve et classé, ni contre l’abattage d’un remarquable micocoulier centenaire en centre-ville ou même contre les rejets de boues rouges en mer (les sujets ne manquent pas !) mais contre… un Parc naturel !
Quelle trahison pour la mémoire de M. Florent Gamet ou George Toche et tant d’autres (dont certains membres actuels de « La Ciotat Cœur de Parc »!) qui avaient dirigé et animé avec tant d’engouement depuis les années 70 l’authentique Comité écologique de La Ciotat à l’époque où il était établi dans les anciens établissements Gamet (aujourd’hui détruits), en face de l’ancien Collège Jean Jaurès, avant ce revirement complet et caricatural de ces dernières années…
Voilà une partie de ce qu’aura révélé la mise en place du Parc. Le rôle de chacun est mieux identifié désormais. Il s’agit maintenant pour nous tous d’en tirer des leçons constructives car nous le rappelons, le chantier de l’amélioration du Parc National, de son rayonnement écologique à La Ciotat et de tout ce qui se trouve autour est à ouvrir et il requiert la participation de tous : élus, associations, citoyens, entité Parc National, collectivités locales et même, Union Européenne. Voilà le vrai « Chemin de l’excellence* » ! Qui est prêt à relever ces nouveaux défis pour notre ville ?
* « Le chemin de l’excellence » : devise officielle de la municipalité de La Ciotat.
Patrick PAPPOLA – Initiateur du collectif associatif « La Ciotat Cœur de Parc »